un spaghetto, trois spaghetti
vendredi 11 novembre 2005 à 02:18
Allez dans la cuisine et ouvrez la boite de spaghetti. Saisissez-en un par les extrémités et pliez le en arc de cercle. Bien sur, à un moment, le spaghetto va se casser. Mais jamais en deux ! Il va toujours se casser en au moins trois parties. Répétez l'expérience si vous voulez vous en convaincre. Comment expliquer ce phénomène ? Deux physiciens français viennent enfin de répondre à cette question cruciale.
Oublions la fable "le chêne et le spaghetto" : je plie mais ne romps pas. Là oui ! C'est même un problème assez ancien. Le très charismatique prix Nobel de physique, Richard Feynman, s'y était intéressé sans succès (si vous ne connaissez pas le bonhomme, procurez-vous ses livres : c'est un extraordinaire conteur et pédagogue).
Basile Audoly et Sébastien Neukirch de l'Université Pierre-et-Marie-Curie expliquent enfin pourquoi un spaghetto sec d'une longueur réglementaire (à peu près 25 cm) se casse toujours en plus de deux morceaux quand on le courbe. Ils viennent de publier un travail à la fois théorique et expérimental. Leur modèle mathématique permet de comprendre le mécanisme et est ensuite validé expérimentalement. Pour cette seconde étape ils ont utilisé une caméra ultra-rapide (1000 images par secondes). La visite de leur site web vaut le détour. On y trouve de superbes vidéos de brisures de spaghetti et leur article original (pour ceux qui lisent l'anglais et n'ont pas peur des équations).
Sans entrer trop loin dans les détails techniques, voilà l'idée générale. Reprenons la chronologie des événements. Le spaghetto n'est pas parfaitement élastique. Quand on atteint la courbure maximale, il finit par se rompre. Mais les cassures ne sont pas simultanées ! Il se casse tout d'abord en deux parties. Chacune de ses parties est encore tenue à une extrémité (par vos doigts). L'autre extrémité en revanche est soudainement libérée de la force qui la courbait et se comporte comme une catapulte.
Une onde élastique se propage alors dans le demi-spaghetto. Mais en se déplaçant, cette onde courbent localement encore davantage le spaghetto et entraîne une cassure secondaire, puis la propagation d'autres ondes. Ainsi de suite... Bien sur ce phénomène ne se produit pas indéfiniment et est vite amorti. L'onde cesse peu à peu de se propager. C'est pourquoi on trouve rarement plus d'une dizaine de cassures.
Je viens de passer la soirée à casser des spaghetti. Presque tout le paquet y est passé et je risque de retrouver longtemps des brins de pâte chez moi. Bien sur il faut tenter l'expérience avec des spaghetti crus. S'ils sont cuits ça marche beaucoup moins bien !
Ajout du 07 octobre 2006 : Basile Audoly et Sébastien Neukirch viennent de recevoir le prix Ig Nobel (dont je parlais dans ce billet pour la cuvée 2005) pour leur travail sur la résistance du spaghetto. Félicitations à eux !
commentaires :
1. vendredi 11 novembre 2005 à 08:29, par Tant-Bourrin :
2. samedi 12 novembre 2005 à 13:48, par Guillaum :
3. samedi 12 novembre 2005 à 14:34, par zydeco :
4. dimanche 13 novembre 2005 à 00:41, par proc' :
5. jeudi 17 novembre 2005 à 20:09, par virginie :
6. jeudi 17 novembre 2005 à 22:24, par proc' :
7. vendredi 2 décembre 2005 à 12:13, par julien le pêcheur :
8. samedi 3 décembre 2005 à 22:03, par proc' :
9. dimanche 29 janvier 2006 à 01:24, par Katia & Toma :
10. dimanche 29 janvier 2006 à 02:36, par proc' :
11. dimanche 4 mars 2007 à 18:16, par Laura :
12. dimanche 4 mars 2007 à 18:52, par proc' :
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